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      Enfin
          me voila pret a vous repondre. C'est qu'une lettre ça ne s'improvise
          pas. Ou plutot si ça s'improvise. Si elle n'est pas seulement informative
          (nous n'ecrivons plus guere que des lettres commerciales ou de rappel)
          il lui faut la spontaneite de la causerie. Je n'ai pas grand chose a
          repondre a votre derniere. A moins de m'engager dans une discussion
          sur la nature du langage, ce qui m'ennuie un peu, parce que ce sont
          toujours les memes principes que je dois repeter il est etonnant de
          constater combien et notamment parmi ceux qui se font une profession
          ou un plaisir d'ecrire les idees fausses sur le langage sont repandues
          a croire que la linguistique n'a jamais existe que pour un minuscule
          cercle d'inities. Fermons s'il vous plait ce chapitre de l'absence.
          Mais je ne suis pas assez createur ou motive ou intelligent pour vous
          proposer un autre theme. J'eprouve en effet de plus en plus de mal a
          me servir de la quantite de mots dont nous disposons et encore plus
          a les arranger savamment (ou dans un desordre etudie ce qui revient
          au meme) grace a une rethorique ingeree des l'ecole. Pour en revenir
          neanmoins au langage et a l'absence (vos remarques me restent quand
          meme sur le coeur ou dans l'estomac enfin quelque part dans la cage
          thoracique) lorsque j'ai parle du langage je n'ai pas dit l'ecriture
          et le blanc mallarmeen entre les mots. La confusion generale faite sur
          le sujet est de croire que les mots et les choses sont liees. Que, lorsque
          je vois une table ou que je me heurte a elle, le mot table tafel tisch
          mesa me vienne a la conscience. Sans doute mais plus souvent encore
          nous voyons des tables et nous n'y pensons pas et parfois le mot surgit
          dans notre esprit alors qu'aucune table ne nous fait de pied. Si le
          mot et la chose etaient liees il y aurait une liaison. Or il n'y en
          a pas. Par contre les mots table et chaise le sont indissociablement
          et le mot cuisine et bien d'autres encore. Il est fort possible que
          les choses soient liees entre elles (voila un beau sujet de reverie)
          et il est certain que les mots le sont entre eux. Par la presence vide
          des mots je ne voulais rien dire d'autre que la presence des mots vide
          de toute autre presence.
         Eux et rien d'autre. Rien d'autre qu'eux. Tout est perdu fors les mots. Et por si parle. Fiat verbi. Si je pense donc je suis je suis un etre de langage.  | 
    
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