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           Je
            suis enfin pret à vous répondre, du moins je le pense.
            Oui les mots et les choses ne sont pas liées entr'elles bien
            qu'"on" en aie fait une grammaire du savoir dans l'exercice
            d'un pouvoir omnipotent. Oui la présence des mots vides de
            toute autre présence. Oui, j'ai jeté encore et encore
            mes jouets hors du parc pour enfant simplement pour que quelqu'un
            me les apporte, à nouveau. Etait-ce pour entamer une brève
            conversation, le sourire en virgule sur le visage ? J'éprouve
            la nécessité de ponctuer vos phrases d'un point d'assentiment,
            comme pour surpprimer les aigreurs que je vous ai fait subir. Bien que je vous
            avoue une ignorance de la linguistique. Ici, à Bruxelles, elle
            trouve un cadre convenu dans les musées, sous la forme d'une
            peinture dont le soleil n'est pas la couleur. Curieux de nommer les
            choses lorsqu'elles sont encadrées. Á l'écran,
            un homme avec une pipe sourit, alors que personne ne sourit. 
            Pouvoir
            vide de nommer ce qui nous encercle dès que nous connaissons
            le nom des choses. Je glisse vers le magnétoscope relié
            à la télivision par un cordon noir comme la fourchette,
            le verre portés par la table. Les choses sont-elles liées
            entr'elles ? 
            Enlevé
            du socle qui le soutennait un cercle vide de poussière témoigne
            de la rondeur de l'objet déplacé. Trace de choses en
            perpétuel déplacement. Chacune par la forme, la matière
            qui la composent cherche une place dans cet espace immeuble. Nous
            lui indiquerons, avant une autre à occuper, vacante ou vide.
            On n'agit pas autrement avec les hommes. 
            Dès
            lors qu'on connait le nom qui les fera choses, habitants de l'inhumanité,
            le pouvoir siège. Nous sommes éduqués à
            prononcer ces mots, "les centres fermés d'acceuil pour
            étrangers sont ouverts". Puis à compter, comme
            l'on dénombre des moutons à la tonte, les grévistes
            d'une usine fermée suite à une "restructuration".
            Autre mot dont le pouvoir outrepasse le sens. Les répititions
            de r et de t craquent dans la cage thoraciques comme des noix que
            l'on brise, avant le claquement du "a" contre le "t",
            ce coup de feu d'une arme. 
            le "tion"
            percute la cartouche. la balle part en vrille comme sifflant "gestion",
            de la main d'un homme vers un homme aux corps vidé par la prison
            de ces mots "vides de toutes autres présences", réfugiés,
            prisonniers, grévistes, chômeurs, sans papiers, opposants,
            étrangers... Un mot tait les vies qu'il nomme, bien avant que
            le sang n'ait fini de couler. 
            Nous sommes
            éduqués aussi à écrire à partir
            de la marge, vers la droite, suivant la ligne, notre nom, notre prénom,
            alors notre vie prend la forme de cette feuille de papier qu'un courant
            d'air, une pluie, une flamme anéanti? Je sors le nez de l'écran. 
          Ce clavier que
            je lache me lie-t-il à lui, sans un mot ? 
            xavier leton 
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